Le selfie d’un macaque, le droit d’auteur sur les animaux?

Souvenez vous de ce macaque à crête qui a réalisé un selfie en dérobant l’appareil du photographe David Slater en 2011 lors de sa visite sur une île d’Indonésie.

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Cette image a fait couler de l’encre. Entre le propriétaire de l’appareil photo qui se prend pour l’auteur de cette image (faussement bien sur), et ceux qui prétendent que l’animal détient le droit d’auteur sur son œuvre ( la gestion du droit risque de se corser pour parler affaire…), on a pas fini d’en parler. Surtout lorsque David Slater, le photographe britannique, continue de croire qu’il est propriétaire des droits sur la photo.

Déjà, en aout de cette année, il avait demandé à Wikipédia le retrait des photos postées du singe, sur la page consacrée à la star aux dents blanches. Il prétendait qu’il ne s’agissait pas de photos appartenant au domaine public. En effet, toutes photos postées sur ce site est par la suite libre de droit. Bien évidemment, Wikipédia avait refusé, ce qui avait été l’occasion pour bon nombre de praticiens du droit de rappeler des grands principes du droit d’auteur.

Wikipédia avait attribué le droit d’auteur au singe, titulaire originaire selon le site des droits sur le cliché.IL est vrai que l’on tend à accorder un droit particulier aux animaux, pourquoi pas les faire titulaires de droits d’auteurs, gérés par leurs propriétaires… ce qui reviendrait in fine a rendre leurs propriétaires véritables titulaires sous conditions, on verrait mal comment un animal pourrait s’occuper de la gestion de droits d’auteurs, même si l’on peut retrouver dans le cliché l’empreinte de la « personnalité » de l’animal. La question est levée.

Depuis 2006, il existe un animal copyright fondation, qui revendique le droit pour les animaux à être titulaire de droits d’auteurs. Un photographe canadien réputé pour son travail avec les animaux du nom de Grégory Colbert en est le fondateur. Si l’idée peut surprendre au premier abord, cela pourrait se défendre.

L’idée de ce photographe est de lutter contre l’utilisation abusive des animaux dans les publicités, ou du moins en tirer profit. Il lance l’idée d’un prélèvement d’1 % sur les recettes des publicitaires concernés pour les reverser au profit de fonds de protections de la nature. En échange, un label leurs serait remis, attestant que les animaux sont bien traités. Cela ressemble plus à un droit à l’image, mais Colbert fait bien référence à un droit d’auteur.

Même si l’idée est bonne, le droit d’auteur suppose d’avoir la personnalité juridique, ce que les animaux n’ont pas au sens légal, étant vu comme des choses par le code civil. Même pour le droit à l’image, car celui ci est vue comme une extension du droit de la personne. Le droit à l’image des biens, quant à lui, existe mais est très dur à mettre en œuvre, il faut prouver un préjudice, une atteinte grave dans l’utilisation de l’image pour reconnaitre ce droit. Cela ne pourrait marcher en l’espèce.

Cet obstacle de la personnalité peut être relevé, du moins partiellement, car celle-ci peut être fictive, par exemple, le droit d’auteur subsiste même après la mort de l’auteur, donc sans personnalité juridique. On encore les personnes morales, vues comme personnalités juridiques, au sens du droit, qui ne sont pas de vraies personnes. Elles peuvent être titulaire, même parfois des facto de l’œuvre. De ce constat, il n’y a pas besoin d’une véritable personne pour créer la personnalité juridique, donc rien n’empêche de la reconnaitre aux animaux.

Un article très intéressant sur le sujet développe l’analyse, écrit par Lionel Maurel, juriste et bibliothécaire, sur son blog « calimaq » :  http://scinfolex.com/2009/08/20/le-droit-dauteur-pour-les-animaux-pas-si-bete/

Boronal - Coucher_de_Soleil_sur_l'Adriatique

Toile peinte par un âne, en 1910, via un pinceau accroché à sa queue : J.R. Boronali.

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